Le Surréalisme

Le renouveau des associations texte/image.

Le surréalisme, le nouveau mode d’expression pure, dont le nom, un hommage à Apollinaire, a été choisi par Soupault et Breton, est défini dans le premier Manifeste du Surréalisme en 1924 par Breton comme étant « un automatisme psychique par lequel on se propose d’exprimer soit verbalement soit par écrit, soit de toute autre manière, le fondement réel de la pensée. Dictée de la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale ».

Le surréalisme renouvelle les associations du texte et de l’image pour renouer avec le pouvoir émotif de l’écriture. En effet, la question du mélange des genres n’embarrassaient pas les surréalistes, d’où le mélange constant du texte et de la photographie. Le concept d’image est même l’un des fondateurs de l’esthétique du mouvement : elle est valorisée pour sa puissance imaginative.

Breton définit l’image dans le Manifeste du Surréalisme en 1924 comme ne pouvant pas « naître d’une comparaison par un rapprochement de deux réalités plus ou moins éloignées. Plus les rapports des deux réalités rapprochées seront lointaines et justes, plus l’image sera forte ».

breton_visualculture

Légende : Breton utilise des photos pour donner un aspect de véracité : les photographies se substitue à la description que les surréalistes ont reniée, tout comme le genre même du roman. Par exemple, à la page 33, l’écrivain évoque son ami Benjamin Péret et au lieu de le décrire comme dans un roman, il juxtapose sa photographie sur la page d’à coté.

Les collages se substituent aux images dans le Paysan de Paris d’Aragon. Véritable défense et illustration du surréalisme, le livre d’Aragon est constitué par ce nouveau stupéfiant produit par l’imagination : l’image, « le vice appelé Surréalisme est l’emploi déréglé et passionnel du stupéfiant image ou plutôt de la provocation sans contrôle de l’image pour elle-même […] car chaque image à chaque coup vous force à réviser tout l’univers »1. Aragon utilise le collage pour ne pas suivre une structure romanesque classique (la déconstruction du récit). Les extraits de journaux, les publicités… que rencontre le narrateur au fil de ses pérégrinations dans Paris sont autant de procédés qui pour l’auteur sont le moteur et la base de l’imagination.

paysanparis_visualculture

Légende : un extrait du Paysan de Paris avec une image des tarifs d’un théâtre dans lequel le narrateur est entré et où il a discuté avec la caissière.

Une autre technique du surréalisme combine à la fois le texte et l’image : le collage. Cette technique de création plastique ou iconique consiste à assembler des matériaux de diverses natures (journaux, papiers…). Le roman-collage le plus représentatif de cette nouvelle technique est celui de Max Ernst, La femme 100 têtes. Ce  »roman », qui se déroule pratiquement sans texte si ce n’est les légendes accompagnant les images, propose au lecteur de découvrir par lui même l’intrigue grâce aux collages, si mystérieux soit-ils : nous sommes en présence d’une narration visuelle. Breton y a vu « le livre d’image idéal de [l’époque] ».

pagelivre

légende : un extrait de La femme 100 têtes.

Si dans le surréalisme les mots et les images s’associent pour renouveler le pouvoir émotif de l’écriture, il est intéressant de noter que si le titre d’une œuvre enrichie l’image (les titres jouent en effet un rôle majeur puisqu’ils participent au sens de l’illustration, le titre d’une œuvre est parfois l’inspirateur de l’image), le titre peut également se métamorphoser en texte pour combler un vide ou produire un décalage comme dans le tableau qui suit de Magritte.

cecinestpasunepipe

1ARON Paul, Les 100 mots du surréalisme, p.60

Laisser un commentaire